Navigation mit Access Keys

L’humus – l’élixir du sol forestier

Menu principal

 

L’humus désigne l’ensemble de la matière organique morte du sol. À sa base se trouve la matière organique morte des plantes (litière), mais aussi des animaux, des champignons et des bactéries. La matière argilo-humique (mélange d’argile et d’humus) est la partie du sol la plus active biologiquement et la plus riche en éléments nutritifs. Beaucoup d’organismes vivants du sol participent à la formation de l’humus (fig. 17). La dégradation de la substance organique se déroule en différentes phases.

 

Phase de broyage

La litière tombée au sol est broyée, dévorée puis excrétée par la macrofaune, après avoir été transformée. Par la suite, ces composés sont incorporés dans le sol par les vers de terre, les enchytrées ou les millepattes notamment. Les petits organismes du sol à l’image des collemboles, acariens et nématodes, ont ainsi plus facilement accès à l’humus.

Phase de dégradation et de transformation

La capacité de dégradation de la litière dépend de la composition de celle-ci. Le rapport carbone (C) / azote (N) est alors déterminant. Pour le feuillage de l’aulne, du frêne, du robinier et de l’orme, ces valeurs C/N se situent à un faible  niveau, entre 12 et 25, d’où la rapide décomposition de leur litière. En ce qui concerne le feuillage de l’érable sycomore, du bouleau, du tilleul, du charme, du peuplier et de l’érable plane, le rapport C/N se trouve à un niveau moyen (entre 25 et 40). La décomposition de leur litière est de ce fait déjà bien plus lente. C’est le feuillage du hêtre et du chêne, ainsi que les aiguilles des résineux, qui présentent la décomposition la plus lente. Leurs valeurs C/N peuvent atteindre 77. Un autre critère influant sur la rapidité de la dégradation de la litière est la teneur en lignine des feuilles et des aiguilles. Seules les espèces fongiques spécialisées sont capables de dégrader la lignine. Chez le hêtre, le chêne et le châtaignier, cette teneur en lignine est particulièrement élevée, d’où une dégradation nettement plus lente.

Les composants organiques sont scindés par les enzymes. Des composants simples inorganiques sont alors libérés (= minéralisation). S’y ajoute toutefois une accumulation relative de substances difficilement dégradables comme la lignine.

Les phases décrites ci-dessus se traduisent tout d’abord par la formation d’humus nutritif, puis d’humus durable.

 

Formes d’humus

En fonction du climat, de la litière et de la roche-mère géologique apparaissent différentes formes d’humus. La forme d’humus est un indicateur de la capacité de transformation des éléments nutritifs dans le sol de surface et par là même du degré d’activité biologique dans le sol.

Dans la forêt suisse, les trois formes suivantes d’humus se constituent dans sols normalement perméables: le mull, le moder et le mor ou humus brut (voir la fig. 18). Les formes d’humus sont définies sur la base de la succession et de l’épaisseur des horizons humifères, ainsi que de la profondeur d’incorporation de la matière organique dans la matière minérale.

 

Le mull

La forme d’humus mull est déterminée par une intense activité biologique. Elle se caractérise le plus souvent par une couche de litière annuelle (horizon L) et une incorporation profonde (plus de 8 cm) de la matière organique dans la matière minérale. Ce mélange confère à la matière minérale une couleur sombre, noirâtre. Cette partie du sol est désignée sous le terme de sol de surface (horizon A). Les édaphons y dominent, en particulier les vers de terre, mais aussi les isopodes, les mille-pattes et autres arthropodes. Selon la saison, l’horizon de litière L peut être complètement absent en raison de l’intense activité biologique. Du fait du mélange intime des substances humiques et de la matière minérale se forment des complexes argilo-humiques, efficaces réservoirs d’éléments nutritifs. Les conditions de pH sont d’acides à alcalines. Lors de la décomposition, une valeur pH pas trop basse et une litière facilement dégradable jouent un rôle décisif. De surcroît, une intense activité biologique nécessite des conditions climatiques équilibrées. De tels sols de surface sont en général bien alimentés en éléments nutritifs: rapport C/N compris entre 9 et 18.

Le moder

Le moder typique est un humus acide qui présente une forte colonisation fongique. Son odeur caractéristique se révèle dans des conditions humides. L’activité des vers de terre et d’autres édaphons est fortement entravée par l’acidité, la sécheresse ou la litière difficilement dégradable. La décomposition de la litière est très lente, et sous la couche de litière encore non dégradée (horizon L) se forme un horizon de fermentation pluriannuel (horizon F). L’épaisseur du sol de surface (horizon A) est inférieure à 8 cm. La forme d’humus moder représente une forme intermédiaire entre le mull et l’humus brut. Le moder est moins actif biologiquement que le mull, mais plus que l’humus brut: rapport C/N compris entre 17 et 25.

Le mor ou humus brut

L’humus brut apparaît en général sur les sols acides. La décomposition de la substance organique est entravée par la réaction du sol fortement acide. Les organismes vivants du sol responsables de la dégradation de la substance organique sont en effet largement absents en milieu très acide. Les champignons acido-résistants ne permettent pas à eux seuls de dégradation intensive. D’où la formation, par rapport au moder, d’un horizon supplémentaire, riche en substances humiques (horizon H). Les différents horizons humifères (horizons L+F+H) sont nettement marqués. Ils peuvent être très épais, et les zones de transition entre les horizons sont le plus souvent caractéristiques. En raison de l’absence de mélange (bioturbation), tous les horizons humifères sont bien typés. L’incorporation de la matière organique dans la matière minérale fine n’est le plus souvent causée que par l’eau de pluie. Le sol de surface (horizon A) est de ce fait généralement de très faible épaisseur et il est peu développé: rapport C/N compris entre 20 et 33.