29.10.2025 | Marco Pütz, Stephanie Kusma | WSL News
Nous vivons depuis des mois à crédit. Le Swiss Overshoot Day, date à laquelle la Suisse a épuisé la part de ressources naturelles qui lui revient pour l’année, est déjà loin derrière nous. Tout ce que nous avons consommé depuis lors excède ce que la planète peut supporter à long terme. Comment les communes rurales peuvent-elles contribuer à réduire cette consommation? C’est la question qu’a étudiée une équipe de recherche de l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage WSL.
- Des économistes du WSL ont étudié comment les petites et moyennes communes suisses peuvent créer les conditions politiques permettant à leur population de vivre de manière sobre, c’est-à-dire en préservant les ressources, tout en bénéficiant d’une bonne qualité de vie.
- De nombreuses communes mettent déjà en œuvre des mesures susceptibles d'avoir un effet sur la sobriété, notamment dans le domaine de la mobilité.
- Les initiatives sont souvent couronnées de succès grâce à l’engagement individuel, à des projets pilotes, à une planification participative et à l’exemple donné par les autorités.
Que peuvent faire les communes rurales sur le plan politique pour que leur population consomme moins de ressources naturelles? Quel cadre peuvent-elles créer pour encourager un mode de vie et une économie sobres? C’est à ces questions que s’est intéressée Tonja Iten, économiste au WSL. Elle a examiné à quoi pourrait ressembler concrètement dans les petites et moyennes communes une politique de sobriété visant à maintenir la consommation de ressources dans les limites planétaires tout en assurant une bonne qualité de vie (voir encadré).
Bien vivre dans les communes rurales ¶
L’équipe de recherche a visité 46 communes dans toute la Suisse et recensé de nombreuses mesures de sobriété, avec une priorité à la mobilité. Les scientifiques ont notamment relevé un bus gratuit reliant trois villages, ou des transports publics gratuits pour les touristes, financés par une taxe de séjour plus élevée.
«Pour les villes, il existe déjà plusieurs études et programmes sur la sobriété», explique Tonja Iten. «Ils portent par exemple sur des quartiers à usage mixte réduisant les trajets domicile-travail, ou sur l’agriculture urbaine, qui raccourcit les chaînes d’approvisionnement.» En revanche, la politique de sobriété dans les zones rurales a été très peu étudiée jusqu’ici. L’équipe a donc interrogé des membres d’exécutifs communaux dans la Suisse rurale sur l’importance de la sobriété dans leurs villages, les initiatives locales existantes, les forces motrices et les obstacles rencontrés. Les résultats viennent d’être publiés dans la revue scientifique Environmental Policy and Governance.
L’initiative individuelle compte ¶
Jusqu’à présent, la sobriété n’a que rarement trouvé sa place dans les politiques publiques. L’initiative personnelle et l’engagement de citoyens et citoyennes sont donc d’autant plus importants. «Dans l’une des communes interrogées, un habitant a lancé une stratégie climatique», raconte Tonja Iten. «Sa démarche a ouvert la voie à de nombreuses mesures de sobriété.» Un mandat politique peut avoir un effet similaire. «Les communes peuvent se fixer elles-mêmes une mission, par exemple en inscrivant l’utilisation parcimonieuse des ressources dans leur règlement communal ou en participant à un programme comme Cité de l’énergie», ajoute-t-elle.
Les projets pilotes jouent également un rôle clé car les rendent les mesures de sobriété et leurs bénéfices visibles et concrets. Ainsi, une limite de vitesse à 30 km/h peut d’abord être perçue comme une contrainte, mais l’expérience montre qu’elle améliore la qualité de vie et la sécurité. L’exemplarité des autorités, la participation et une communication judicieuse sont tout aussi importantes: «Quand une commune présente, par exemple lors d’une promenade publique, un projet de piste cyclable, elle crée un climat de confiance et s’assure que le projet correspond réellement aux besoins locaux», commente la chercheuse.
La mise en œuvre d’une politique de sobriété est souvent freinée par un manque de ressources: les petites communes disposent généralement de peu de temps, de personnel et de moyens financiers, souvent affectés à d’autres tâches. Un soutien financier de la Confédération ou du canton peut remédier à cette situation. Parmi les autres obstacles figurent la crainte d’une résistance de la population, un manque d’intérêt ou la priorité donnée à d’autres thèmes.
La sobriété comme effet secondaire ¶
Les communes étudiées n’ont pas été choisies au hasard: l’équipe a délibérément retenu celles qui poursuivent des objectifs ambitieux de durabilité, et documenté plus de 500 mesures prévues ou déjà mises en œuvre.
«Beaucoup de ces mesures n’étaient toutefois pas explicitement des mesures de sobriété», précise Tonja Iten, «mais poursuivaient principalement d’autres objectifs.»
Par exemple, le renforcement de l’économie locale: lorsqu’une commune achète des produits alimentaires pour ses crèches ou ses établissements médico-sociaux auprès de producteurs locaux, cela raccourcit les trajets, économise des ressources et renforce, indirectement, la sobriété communale.
Cela montre que, même si seules deux des communes interrogées utilisaient explicitement le terme de «sobriété», les communes rurales disposent déjà de nombreux leviers pour mener une politique de sobriété.
Il existe trois stratégies différentes en matière de durabilité.
- L’«efficacité» consiste à consommer ou à produire la même quantité avec moins de ressources.
- La «cohérence» signifie concevoir des produits et des services respectueux de la nature et boucler le cycle des ressources.
- La «sobriété» consiste à consommer et à produire moins, de manière plus économe en ressources, plus lente et plus locale. Par exemple, se déplacer à vélo plutôt qu’en voiture, acheter des produits alimentaires régionaux ou créer des Repaircafés.
La politique de sobriété crée les conditions-cadres pour une vie et une économie sobres. Elle s’appuie sur le concept des limites planétaires, qui décrit dans quelle mesure l’humanité peut utiliser les ressources naturelles et solliciter les systèmes écologiques centraux sans mettre en danger la stabilité de la Terre et donc nos moyens de subsistance.
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