Changement climatique : le printemps commence trop tôt pour les chevreuils

Alors que la végétation se réveille de plus en plus tôt en raison du changement climatique, la période de la mise bas chez les chevreuils ne se décale que lentement. Cela modifie la nourriture disponible pendant l’élevage des jeunes. Les populations à basse altitude sont les plus touchées, comme l’a montré une étude de l’Institut fédéral de recherches WSL.

Les animaux sauvages donnent naissance à leur progéniture au moment où les conditions environnementales garantissent un taux de survie optimal. Les faons viennent donc au monde au début de la période végétative. Les chevrettes allaitantes disposent alors d’herbes et de plantes herbacées tendres et facilement digestibles, à forte teneur en énergie et en protéines. Comme le changement climatique entraîne un développement de la végétation de plus en plus précoce, la période où la nourriture est la plus abondante et celle des mises bas chez le chevreuil se chevauchent de moins en moins souvent sur le Plateau suisse. C’est ce que montrent les résultats d’une étude menée par Kurt Bollmann, biologiste de la faune sauvage au WSL.

Une marque auriculaire pour les faons

En Suisse, les faons sont marqués à l’oreille depuis 1971, et le lieu de leur découverte est soigneusement consigné. Pour leurs recherches, Maik Rehnus du WSL et Marta Peláez de l’Université polytechnique de Madrid ont comparé les dates de mise bas de 8983 faons de 1971 à 2015 avec des données à long terme sur le début de la période de végétation et la date de la première fenaison. C’est en effet dans cette fourchette que les conditions d’alimentation des chevrettes allaitantes sont optimales.

La période végétative commence en moyenne 0,45 jour plus tôt chaque année et la première fenaison 0,32 jour plus tôt. Au cours des 45 années étudiées, le début de la végétation a ainsi été décalé de 20 jours et la fenaison de 14 jours, mais les dates de mise bas n’ont avancé que de trois jours au total, à raison de 0,06 jour par an. À toutes les altitudes, elles ont évolué sept fois (resp. cinq fois) plus lentement que la végétation. La lenteur de cette adaptation pourrait être due en partie au fait que la reproduction du chevreuil est contrôlée par le rapport jour/nuit, qui n’évolue évidemment pas sous l’effet du changement climatique.

L’écart se creuse entre les conditions optimales et les dates de mise bas

À basse altitude, les mises bas se produisent de plus en plus en dehors de la période où les ressources alimentaires sont idéales, alors qu’elles sont optimales à haute altitude. Selon les chercheurs, les conséquences sont incertaines. « Grâce à la gestion à relativement petite échelle et en mosaïque des cultures agricoles variées échelonnées dans le temps, les chevreuils trouvent suffisamment de nourriture même quand les conditions ne sont plus optimales dans les prairies », explique Kurt Bollmann. Il est toutefois possible que le chevreuil se raréfie sur le Plateau à l’avenir et qu’il colonise plus fortement les zones de collines et de montagnes, car le développement de la végétation y commence plus tard et coïncide donc mieux avec les mises bas.

Pour les populations de chevreuil, l’impact de ce décalage entre les dates de mise bas et le développement des prairies dépendra non seulement de la gestion des autres cultures, mais aussi des conditions météorologiques en hiver et pendant l’élevage des jeunes. Les chercheurs recommandent donc de prolonger le suivi des faons et même de le densifier à basse altitude : « De cette façon, l’évolution des populations de chevreuil sera détectée à temps et la gestion de la chasse pourra être ajustée en conséquence », explique Maik Rehnus, premier auteur de l'étude.

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