Régénération durable des forêts de montagne

De meilleures bases pour l'évaluation et une gestion plus ciblée de la régé-nération naturelle dans les forêts de montagne

Le projet "Régénération des forêts de montagne" a pour objectif de créer des bases professionnelles sur la manière de promouvoir à long terme et de manière durable la régénération naturelle dans les forêts de montagne par la sylviculture. Des expérimentes sylvicoles de longue durée ont été lancées sur dix sites expérimentaux dans des forêts d'épicéas et de sapins, et des connaissances sur le développement de la régénération naturelle sont acquises à partir d'inventaires répétés du peuplement et de la régénération. Il s'agit également d'étudier l'impact des changements environnementaux, y compris le changement climatique, sur la régénération naturelle. Il est essentiel de préserver l'effet protecteur des forêts de montagne, par exemple contre les dangers naturels, qui est influencé par la densité de la régénération et par le boisement. Enfin, il s'agit de créer, entre autres, des outils pratiques pour l'évaluation de la régénération naturelle.

Actualités

Les dix sites expérimentaux ont été installés et le premier grand inventaire de la régénération (état initial) a eu lieu partout. Les interventions sylvicoles ont également été réalisées partout. En 2024, les clôtures seront installées sur les deux derniers sites expérimentaux. L'inventaire de la régénération après l'intervention sylvicole (inventaire d'intervention) a pu être achevé en été 2023 dans sept sites sur dix. L'objectif principal de cet inventaire d'intervention est de comprendre le niveau de mortalité et les dommages à la régénération naturelle suite causés par la récolte des bois. En été 2023, le deuxième grand inventaire de la régénération a pu être réalisé sur trois des dix sites expérimentaux ; il a été effectué un an après l'inventaire des interventions. Ce monitoring de la densité de la régénération, du degré de recouvrement de la régénération et de la végétation du sol, de l'évolution démographique des plantes individuelles de la régénération ainsi que le relevé du microsite (y compris du sol et de la lumière), se poursuivront dans les années 2024-2025. Parallèlement, les dommages à la régénération et l'intensité d’abroutissement seront également mesurés. Au cours des prochains mois d'hiver (2023-2024), nous attendons avec impatience les premiers résultats. En été 2024, les informations obtenues donneront un premier aperçu des effets à court terme des interventions sylvicoles sur la régénération naturelle et ses microsites dans les forêts de montagne.

Motivations

La régénération forestière d'aujourd'hui est la clé des services forestiers de demain. La dynamique de régénération présente une forte variabilité temporelle et spatiale (nombre de tiges de moins de 500 ha-1 à bien plus de 100 000 ha-1), ce qui conduit à de grandes différences dans la densité de régénération entre les essences et les tailles des arbres. Par conséquent, les réserves de régénération sont difficiles à évaluer et leur quantification nécessite une connaissance approfondie des processus de régénération dominants ainsi que des facteurs d'influence potentiels. Cela comprend diverses menaces liées aux événements météorologiques défavorables (par exemple, neige mouillée, sécheresse), aux agents pathogènes (par exemple, moisissure des neiges) et aux animaux sauvages (en particulier l'abroutissement). Étant donné que ces facteurs d’influence interagissent fortement et ont souvent un impact sur les processus de régénération sur plusieurs décennies, ils rendent difficile une évaluation fiable de la régénération forestière.

De grands progrès ont été réalisés dans des domaines importants de la gestion des forêts de montagne au cours des dernières décennies, par exemple dans l'évaluation de l'effet protecteur des structures des peuplements. Cependant, il existe encore de grandes lacunes dans les connaissances dans le domaine de la régénération en raison du défi majeur que représente la sélection et l'enregistrement des paramètres clés qui reflètent la situation de la régénération avec suffisamment de précision. De plus, il est difficile d'estimer comment la régénération va évoluer, car la mortalité des plantes en régénération et les semis supplémentaires peuvent être soumis à des fluctuations extrêmes. Et ce, même si une régénération forestière suffisante et diversifiée constitue très souvent un facteur déterminant dans la gestion des forêts de montagne et constitue la base de la forêt de demain.

Objectifs du projet et questions de recherche

Les objectifs du projet à long terme (horizon 2025-2030) sont :

  • Créer une base technique pour que la régénération naturelle puisse être efficacement favorisée par la sylviculture. À long terme, la régénération devrait donner lieu à des peuplements conformes aux objectifs et fournissant d'importants services forestiers (accent sur la forêt de protection).
  • Préciser comment le changement climatique affecte le développement de la régénération. Par exemple, lors d'étés secs, la mortalité des plantes régénératrices d'espèces d'arbres sensibles à la sécheresse pourrait être augmentée ou, à plus long terme, des semis d'espèces d'arbres provenant de plus basses altitudes pourraient s'établir de plus en plus de façon naturelle.
  • Élaborer un « Guide pratique d'évaluation de la régénération naturelle ». Ce guide méthodologique est destiné à fournir des informations sur la régénération naturelle au niveau du peuplement qui soient significatives, techniquement solides, compréhensibles et robustes (reproductibles). Une application importante de ces informations est la prise de décision sylvicole dans le cadre de NaiS (« Gestion durable des forêts de protection »).

 

Le projet se concentre sur les forêts de sapin blanc et épicéa. Cependant, les résultats du projet sont susceptibles d’être pertinents pour d'autres types de forêts également.

Pour la création des bases professionnelles, les éléments suivants sont déterminés :

  1. La dynamique démographique (le développement à long terme des populations d'arbres) de la régénération naturelle dans les forêts de montagne.
  2. L'influence des facteurs (station, peuplement, perturbations) qui sont importants pour la régénération naturelle (développement démographique, nombre de tiges, distribution des tailles, croissance en hauteur, composition des espèces d'arbres).

En outre, des études d’accompagnement sur les sous-processus sont prévues pour améliorer la compréhension mécanistique des processus de régénération dans les forêts de montagne.

Sites expérimentaux

Au total, dix sites expérimentaux ont été installées dans les Alpes suisses (tableau 1 et figure 2). Les critères importants pour la sélection des sites étaient les suivants :

  1. l’homogénéité : Grande similarité au sein de chaque site testée en ce qui concerne la structure du peuplement, le relief, l'exposition et le type de station.
  2. la composition des essences : Bonne représentation de l'épicéa et du sapin blanc dans la régénération ainsi qu'un gradient de la proportion de sapin blanc dans le peuplement adulte.
  3. gradient environnemental/de station : Les principaux types de station dans les sapinière-pessières ont été considérés, avec des différences d'altitude et d'aspect. 

Les stations des Alpes centrales continentales ont été délibérément évitées car on n'y trouve que rarement des sapins.

Tous les sites expérimentaux ont une superficie de 1,5 hectare. Ils ont été établis en tant que placettes de recherche en croissance et production forestière (seuil d’inventaire : 4 cm). Ils sont garantis par contrat en tant que sites de recherche à long terme.

Tableau 1: Caractérisation des sites expérimentaux

Commune (Canton)

Altitude (m)

Orientation

Type de station (sera examiné)

Proportion en sapin blanc (estimation, %)

Albula (Grisons)

1300

N

53*Ta

0

Flüelen (Uri)

1485

NW

50 + 57C

18

Lauterbrunnen (Berne)

1495

E

46

0/individuels

Ormont-Dessus (Vaud)

1480

NW

50(49)

30

Pfäfers (St. Gall)

1530

W

51(60*) + 50(50*)

20

Rougemont (Vaud)

1600

NW

50

2

Sagogn (Grisons)

860

NE

52F

10

Viège (Valais)

1120

N

55*Ta

98

Wildhaus-Alt St. Johann (St. Gall)

1365

N

50

0/individuels

Conception expérimentale

La conception de l'étude permet l'observation à long terme des populations de régénération sur des gradients de l’environnement (des facteurs de station). À cette fin, dix sites expérimentaux ont été sélectionnées comme études de cas et des interventions sylvicoles (trois traitements) sont mise enplace, ce qui augmente encore les gradients de micro-stations existants. Cette conception permet d'évaluer le développement de populations de régénération avec un nombre statistiquement significatif de plantes dans différentes conditions environnementales. Les traitements sylvicoles ciblés permettent de tester et de quantifier les effets des interventions sur les micro-stations (principalement la végétation au sol) et le développement de la régénération.

  • En phase I, l'état initial des peuplements forestiers (structure du peuplement, régénération) des dix sites expérimentaux est enregistré au moyen d'un inventaire sur environ 500 placettes.
  • En phase II, chaque site expérimental est divisée en trois sous-sites pour différentes interventions sylvicoles. Dans l’une sous-site, il n’y a pas d’intervention (contrôle), dans une autre, il y a une intervention faible (prélèvement d’environ 15-20% du volume sur pied) et dans la dernière, il y a une intervention forte (prélèvement d’environ 25-30% du volume sur pied) (figure 3). Quatre petites clôtures à l'épreuve des cerfs (hauteur 2 m) sont placées dans chaque sous-sites pour démontrer l'influence des ongulés sauvages sur la régénération.
  • En phase III, l'inventaire de régénération dans les placettes est répété sur toutes les sites expérimentaux selon un cycle de 3 ans.

Inventaire de la régénération

Les processus de la régénération sont examinés dans environ 500 placettes, plus précisément dans 36-54 placettes par site expérimental. Une placette est constituée de trois anneaux circulaires concentriques (Figure 4) : 10 m2 pour les semis de la classe de taille 1 (1 an jusqu’à 9,9 cm de hauteur, les germinants ne sont pas enregistrées), 20 m2 pour la classe de taille 2 (10 cm à 39,9 cm de hauteur), et 50 m2 pour la classe de taille 3 (40 cm de hauteur à 3,9 cm de dhp). Le cercle intérieur autour du centre de la plaquette (rayon = 60 cm) n'est pas enregistré. À l’aide d’un anneau d’azimut, les positions des plantes de la régénération sont mesurées (Figure 5, Figure 6).

L'inventaire de la régénération se compose de trois parties :

  1. Enregistrement des caractéristiques des microstations (relief et végétation) et présence de régénération en 12 points.
  2. Enregistrement et marquage des individus individuels, de leur microstations et de leur développement (mortalité, hauteur de la plante) en se concentrant sur le premier quadrant ;
  3. Comptage du nombre de plantes de régénération sur les anneaux concentriques des placettes selon l'espèce d'arbre et la classe de taille.

En outre, l'épaisseur de la couche organique, la forme de l'humus et les conditions de lumière sont déterminées à 4 des 12 points par placette à l'aide d'un solariscope (Behling engineering Hermannsburg, Allemagne).

Chaque année, des sujets de thèse sont mis au concours et plusieurs stages sont proposés pendant les mois d'été.

Images

Fotos: L. Scheele, C. Spori, E. Hartmann, F. Fürst, P. Nikolova, R. Schai

Autres partenariats

WSL Unité de recherche Dynamiques du paysage

ZHAW Wädenswil

ETH Zürich

TU München

Bulgarische Akademie der Wissenschaften

Travaux d'étudiants terminés

Eggenberger, Nicole (2022): Ökologie im Gebirgswald – wie viel Licht braucht die (Ko-)Existenz? Bachelorarbeit. Wädenswil/Birmensdorf: Zürcher Hochschule für Angewandte Wissenschaften/Eidgenössische Forschungsanstalt WSL, 32 S.

Fox, Felix (2021): Bestimmende Faktoren für die Weiß-Tannen- (Abies alba), Fichten- (Picea abies) und Vogelbeeren- (Sorbus aucuparia) Naturverjüngung im Gebirgswald der Gemeinde Flüelen, Kanton Uri, Schweiz. Bachelorarbeit. Hochschule für Forstwirtschaft, Rottenburg, Deutschland. 86 S.

Probst, Tamara (2022): Abhängigkeit der Naturverjüngung von Tanne (Abies alba) und Fichte (Picea abies) von lokalen Umweltfaktoren in Tannen-Fichtenwäldern. Masterarbeit. D-USYS, ETH Zürich, 60 S.

Publications et rapports

Ambs D, Schmied G, Zlatanov T, Kienlein S, Pretzsch H, Nikolova PS, 2024. Regeneration dynamics in mixed mountain forests at their natural geographical distribution range in the Western Rhodopes. Forest Ecology and Management 552, doi.org/10.1016/j.foreco.2023.121550

Kalt T, Nikolova P, Ginzler C, Bebi P, Edelkraut K, Brang P, 2021. Kurzes Zeitfenster für die Fichtennaturverjüngung in Gebirgsnadelwäldern, Schweiz Z Forstwes 172: 156-165

Zaugg A, Lässig A, Nikolova P, Brang P, 2020. Projekt Gebirgswaldverjüngung: Dokumentation der Flächenauswahl. Interner Bericht. Birmensdorf, Eidg. Forschungsanstalt WSL, 9 S. + Anhang.

Brang P, Nikolova P, Gordon R, Zürcher S, 2017. Auswirkungen grosser Verjüngungslücken im Gebirgswald auf Verjüngung und Holzzuwachs. Schlussbericht des Projektes Eingriffsstärke und Holzzuwachs im Gebirgswald. Birmensdorf, Eidgenössische Forschungsanstalt WSL. 48 p.